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DJIBOUTI : non à la complicité internationale avec la dictature d’Ismaël Omar Guelleh

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Le président djiboutien Ismaël Omar Guelleh a achevé vendredi 12 février deux jours de visite officielle en France. Lors de leur dernière rencontre en 2019, IOG avait regretté la baisse de l’implication économique française dans son pays. IOG a donc démarré sa visite par une rencontre avec le patronat français vantant son pays, ses infrastructures portuaires et de télécommunications, sa monnaie « à parité fixe avec le dollar », minimisant enfin les risques que fait peser sa dette publique sur son économie. Un accord pour la construction d’une centrale photovoltaïque a ensuite été signé avec l’électricien Engie, ainsi que des partenariats privés et publics dans les secteurs de l’hôtellerie, de la recherche et de l’environnement, et notamment une coopération entre les collectivités locales de Djibouti et la région Provence Alpes-Côte d’Azur.

Pour les affaires militaires, c’est moins simple : une déclaration commune sur le renouvellement de l’accord de défense existant jusqu’en 2023 aurait été signée par les deux présidents. Aucune déclaration n’a en revanche été faite sur les questions techniques qui restent en suspens. Paris entretient près de 2000 soldats à Djibouti (au cours des vingt dernières années, le contingent militaire français a été divisé par deux), pour toutes sortes de missions : lutte contre la piraterie, renseignement, formation, ou pour des opérations aériennes… La France veut conserver cette base que Djibouti veut remplacer par un quartier d’affaires de standing mais jusqu’à récemment, les propositions alternatives de Djibouti n’avaient pas reçu l’assentiment de la France.

Djibouti, enclave d’un million d’habitants cernée par des pays en crise, du Yémen à l’Érythrée, la Somalie et maintenant l’Éthiopie, s’est progressivement transformé en État-garnison. Moyennant un loyer annuel de 40 millions de dollars et la défense de l’espace aérien djiboutien, les militaires français  peuvent accueillir et projeter rapidement des forces en cas de crise dans la sous-région, vers l’océan Indien ou le Moyen-Orient. On sait que les Italiens ont également eu une base, que  les Allemands et les Espagnols qui sont présents, sans avoir de base. Cette importante et coûteuse présence militaire française, survivance de l’héritage colonial qui a perduré à Djibouti plus longtemps qu’ailleurs, devrait être reconsidérée au profit d’un engagement européen plus équilibré et plus impliquant plutôt que cette approcha dispersée de la sécurité.

Le pays qui accueille cinq grandes bases militaires se veut le gardien de la sécurité dans la Corne de l’Afrique mais aucune retombée de la manne financière ne parvient jusqu’à la population classée parmi les plus pauvres au monde avec un taux de chômage de 60 %, voire de 80 % chez la population jeune majoritaire.

De plus, IOG qui a fait modifier la Constitution en 2010 pour supprimer toute limitation du nombre de mandats présidentiels,  est candidat à un cinquième mandat en avril 2021 !

Mais là où Macron devrait au nom de la France exiger des élections libres et transparentes, garanties par la communauté internationale et engager l’UE dans un repositionnement militaire commun qui soulagerait les dépenses d’opérations extérieures et permettrait à la France de tourner le dos à son néocolonialisme qui n’est plus de saison, il ne prend aucune disposition pour sortir de ce pseudo-chantage et de cette relation malsaine du je t’aime moi non plus, pour reprendre l’expression de la chercheuse Sonia Le Gouriellec.

Le Parti de Gauche se joint à l’opposition djiboutienne unie dans sa volonté d’organiser une transition démocratique afin de bouter dehors le dictateur IOG responsable de la souffrance et de la pauvreté affligée à son peuple, responsable d’actes de guerre que sont les massacres de civils et les viols des femmes.

Le Parti de Gauche dénonce cette tentative de passage en force d’un 5e mandat présidentiel d’IOG avec l’appui de Macron qui préfère fermer les yeux.

Le Parti de Gauche déplore l’absence totale de vision politique du gouvernement français incapable de poser les bases d’une réorientation de notre implication militaro-politique dans ce pays.

Pierre Boutry

Déclaration de la Commission Afrique du Parti de Gauche

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Compte-rendu de la manifestation djiboutienne du 12 février 2021 contre la venue de Guelleh à Paris

Les participants à la commémoration des tueries de Djibouti tenue le 18 décembre 2020 à Paris avaient pris date pour une mobilisation historique à Paris contre la venue d’Ismaël Omar Guelleh en février 2021.

Chose promise, chose due : une centaine de citoyens Djiboutiens et d’amis démocrates ont rejoint vendredi 12 février 2021 la Place de la Madeleine à Paris non loin de l’hôtel Triton où une bonne partie de la délégation djiboutienne était logée le temps de la visite.

L’Alliance républicaine pour le développement (ARD) coorganisatrice de la manifestation avec l’Association pour la démocratie et le développent (ADD) ont accueilli une participation forte de nombre d’organisations politiques et de la société civile djiboutienne.

Le FRUD, l’UDJ, le MRD, le FPC, le Collectif Halgan, le Collectif breton, le Comité des Femmes Djiboutiennes contre les Viols et l’Impunité (COFEDVI) et plusieurs personnalités ont fait le plein de participation pour dire non à la coopération française de la honte avec la dictature de Djibouti.

Le rassemblement visait aussi à dénoncer le projet de 5e mandat d’Ismaïl Omar Guelleh, candidat à sa propre succession en avril 2021 après avoir tronqué la constitution en avril 2010, mais aussi à rendre hommage aux victimes de la dictature dont les prisonniers politiques chaque jour plus nombreux.

Des slogans nombreux ont fusé dénonçant la coopération française avec Djibouti, le projet de 5e mandat et les tueries continuelles de civils à Djibouti sous les régimes d’Ismaël Omar Guelleh et de son prédécesseur Hassan Gouled Aptidon.

Membres et sympathisants d’organisations djiboutiennes ont bravé froid glacial et crise sanitaire pour faire de déplacement depuis plusieurs villes en France, dont la ville de Rennes en force, et depuis la Belgique.

Ces militants de la liberté sont Mohamed Saïd Omar (dit Mohamed Gennevilliers), Idil Mohamed Ahmed, Abdourahman Hassan Abdillahi, Mohamed Ali Saïd, Omar Abdi Awled, Mohamed Said Abdoul-wahed, Mohamed Harbi Osman, Mohamed Soltan Dileyta, Abdallah Kalil, Hamza Hassan Issa, Bilal Hachin Ibrahim, Mahdi Hamoud Yacin, Abdourazak Mohamed Robleh, Elmi Hassan Abdi, Moustapha Ahmed Youssouf, Abass Abdourahman et Aboubaker Sek Abdoulkader.

Les principaux slogans entendus étaient « Non au 5e mandat », « non au soutien de la France », « Non au pouvoir à vie », « libérez les prisonniers politiques », « 43 ans d’impunité ça suffit, ça suffit », «  Justice pour Bouldhuqo », « État de droit à Djibouti », « Halte aux massacres des civils »,  « Halte aux viol des femmes », « Guelleh dictateur, la France complice », « Halte aux massacres des civils »,  « Halte aux viol des femmes », « Asha’b yurib, Isqaata niddaam » (le peuple veut la chute du régime) « Birruh, Biddam, Nihdiik ya Djibouti » (par la vie, par la lutte, Djibouti, nous te libérerons), « Non à la Françafrique ».

Une forêt de drapeaux djiboutiens et de pancartes s’élevaient dans le ciel parisien reprenant les slogans entonnés par les manifestants et étaient complétés par la banderole géante de la Plateforme Panafricaine avec l’inscription « Non à plus de deux mandats en Afrique ».

Les intervenants ont vilipendé la politique anti démocratique à Djibouti et ont présenté de nombreux messages aux Djiboutiens.

Intervenants :

Mahdi Barreh, membre du FRUD, arrivé de Bruxelles, a fustigé le harcèlement  de l’opposant Abdourahman Barkat God à Djibouti pour ses interventions très suivies diffusées sur les réseaux sociaux. Le 5e mandat présidentiel sera synonyme de perte totale de notre liberté voire de notre survie en tant que citoyen si un sacrifice n’est pas consenti pour contrecarrer ce dessein.

Abdourahman Mohamed Habib, dit Amigo, arrivé de Rennes, rappelle que la France est aussi le pays de nombreux binationaux, que le dictateur ne pourra y raconter n’importe quoi à sa guise. « Nous avons communiqué sur le danger de fournir des armes à ce régime », sachant qu’ils seront retournés contre la population civile. Amigo a demandé aussi la libération des prisonniers politiques.

Mohamed Doubad, responsable du Collectif Halgan et syndicaliste a dénoncé également le harcèlement d’Abdourahman Barkhat God et appelé à la solidarité. Il a dénoncé la détention de Fouad Ali Youssouf et Youssouf Mohamed Gabassé et de tous les détenus. Enfin, il a appelé à l’arrêt des arrestations arbitraires qui se multiplient à Ali Sabieh et dans tous les districts du pays.

Mohamed Kadamy, président du FRUD et doyen de l’opposition, a présenté un long message. Il a rappelé que M. Guelleh était l’artisan de tueries, de tortures, de viols de femmes depuis 43 ans qui ont touché toutes les sphères de la communauté nationale. M. Kadamy a appelé à impulser une convergence de luttes. Il a annoncé la mise en place d’une commission qui travaille sur la transition démocratique à Djibouti, qui rendra publics ses travaux sous peu. La période de transition servira à mettre place un État national et démocratique, ainsi qu’une armée nationale en lieu de place de la milice tribale qui sévit depuis 43 ans. Il a dénoncé enfin l’arrestation de proches de membres du FRUD sous un « nouveau délit » de leur parenté avec les combattants et a appelé à la libération de tous les détenus politiques.

Abdallah Khalil, Chargé de mobilisation au sein du MRD, a relevé le paradoxe d’un investissement dit économique à Djibouti alors que la population s’appauvrit chaque jour davantage. Il a appelé à accentuer la lutte pour empêcher le 5e mandat afin de mettre un terme à ce système de privation.

Maki Houmed-Gaba, représentant de l’ARD, coorganisateur de la manifestation avec l’ADD, a rappelé l’intérêt de la lutte tous ensemble et de soutenir la formation ARD qui se débat dans un non-droit administratif à Djibouti. Il a rappelé la part de l’ARD dans la mobilisation à Djibouti et à l’étranger. L’État monopolise chaque jour les moindres activités économiques d’où le nombre de plus en plus important de Djiboutiens sur les routes de l’exil de par le monde. Il a regretté que la France veuille fermer les yeux sur une réalité qui finira par rejaillir sur la qualité des relations avec les Djiboutiens.

Saïd Houssein Robleh, Président de l’UDJ, arrivé de Bruxelles, a scandé une série de slogans « IOG à La Haye », « Libérez les prisonniers politiques ». « Guelleh assassin, la France complice. ». Il a mis en exergue la complicité de la France à deux mois d’une mascarade électorale avec un dictateur responsable de souffrance et de pauvreté affligée à son peuple. Il a regretté que les Djiboutiens n’aient pu manifester plus près de l’Élysée ni face à la résidence « bien mal acquis » de la famille Guelleh à Paris. La France serait fidèle à son ancien policier français de la période coloniale.

Cheikh Guireh Maidal, personnalité politique, est arrivé de Belgique pour adresser un message au peuple djiboutien. Il a mis en garde ceux qui pensent échapper à la répression mais qui seront les uns et les autres rattrapés. Il a fustigé l’expropriation visant l’opposant Abdourahman Barkat God à Djibouti par un État qui pille ses citoyens. Il a mis en garde aussi contre la « somalisation » flagrante de Djibouti où l’État de droit disparaît progressivement. La garde à vue de 48 h en commissariat est passée à une détention illimitée et sans jugement en caserne. « Chaque fois qu’on ferme les yeux sur un non droit il faut s’attendre au pire rapidement » a conclu Cheikh Guireh Meidal.

Moustapha Ahmed Youssouf, membre actif de l’ARD en France, a remercié les participants et a rappelé les raisons du rassemblement destiné à dénoncer la venue à Paris d’Ismaïl Omar Guelleh et de sa délégation. Il a pointé que la France s’était désormais affichée comme complice de la dictature aux yeux des Djiboutiens.

Abdirahman Ibrahim Olhayeh, membre du MRD, arrivé également de Belgique, a demandé aux Djiboutiens d’être solidaires et de se mobiliser pour faire tomber ce régime, seule voie pour chaque djiboutien réprimé de ne pas se sentir seul. Il a demandé à  chacun de faire raisonner ses proches trompés par l’appât du gain du régime. Il a condamné la répression et demandé la libération des prisonniers politiques.

Ahmed Kassim Isse, Président de l’ADD, coorganisateur de la manifestation, a remercié les participants nombreux et rappelé que le rassemblement visait à susciter l’unité des Djiboutiens. Il a regretté que la France ferme les yeux simplement pour faire respecter des intérêts et qu’elle semble vouloir soutenir une présidence à vie pour le dictateur de Djibouti.

La manifestation a pris fin à 16h et les participants ont pris date pour se tenir informés de la situation de mobilisation en cours partout dans le monde contre le 5e mandat du tyran Ismaïl Omar Guelleh.

Un merci appuyé est adressé aux trois télévisions en ligne Sahan TV, Ardoukoba TV et La Voix de Djibouti pour la couverture et la diffusion en direct de la manifestation aux quatre coins du monde.

Maki Houmed-Gaba

Fait à Paris, le 14 février 2021

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