Macron, cherchant certainement à échapper aux gilets jaunes, a accepté de passer une nuit sur place à Djibouti (ce que même Sarkozy avait refusé de faire). Il rend visite le lendemain au président djiboutien Ismaïl Omar Guelleh, façon scandaleuse de réactiver un soutien diplomatique qui n’existait plus depuis l’affaire Borrel (toujours pas résolue depuis la reconnaissance de son assassinat) et de satisfaire le lobby militaire français. Il vient rassurer ce délicieux partenaire à un moment où ce dernier est fragilisé par le rapprochement entre l’Ethiopie et l’Erythrée.
Mais Macron s’illusionne en pensant que la France peut être « un possible contrepoids à la Chine dans cette région » et ce ne sont pas quelques vagues allusions au climat des affaires et à la situation en Algérie qui ébranleront le pouvoir en place. IOG, qui a fait changer la Constitution en 2010 pour rester indéfiniment au pouvoir et qui règne par la division ethnique, est bien trop occupé à faire commerce de bases militaires étrangères et à réprimer toute opposition y compris en poursuivant le leader du FRUD en France. Alors qu’il fallait sortir de la complaisance, Macron, en bon manager des intérêts de la caste militaro-industrielle au pouvoir, s’incline sans aucun scrupule devant le despotisme sanglant et ne daigne même pas recevoir l’opposition. Cette dernière contrairement à ce que prétend certain journaliste français aux ordres, a dénoncé la complaisance et le cynisme macroniens, il suffit pour s’en convaincre d’écouter la déclaration du Président de l’ARD Adan Mohamed Abdou http://ard-djibouti.org .
En Ethiopie, Macron vient après tout le monde en particulier la Chine, l’Inde,l’Italie, la Turquie et les USA et il ne lui reste plus qu’à proposer le savoir-faire français en matière de préservation du patrimoine appliquée aux églises de Lalibela et au palais présidentiel, ce qui ne suffira pas à conférer à la France un rôle actif dans les changements à venir. Macron a aussi signé un accord cadre pour doter d’une marine de guerre un pays qui n’a plus accès à la mer depuis 1991 ; les contrats attendront une implantation probable dans le port de Massawa dans la très répressive Erythrée à laquelle la France donnera ainsi une sorte de caution morale.
Quant au Kenya, qui fut un pôle de stabilité de l’Afrique des Grands Lacs, aujourd’hui bien menacé par les clivages internes et les menaces de déstabilisation externes, il est l’occasion du « One Planet Summit » consacré à l’environnement. Lancé en décembre 2017 à Paris par Macron, avec l’ONU et la Banque mondiale, (avec le slogan déjà entendu ailleurs « Make our planet great again »), afin de mobiliser des financements « verts » et de favoriser les « solutions concrètes » en matière de climat, de protection des océans et de la biodiversité, cet obscur sommet en sera à sa troisième édition (la deuxième n’ayant pas laissé de trace dans les mémoires). Nairobi abrite le siège du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) – le sommet One Planet s’insère dans sa 4e assemblée générale –, mais elle est aussi l’épicentre des start-up qui prétendent révolutionner le quotidien de millions d’Africains.
Les promesses de la COP21 pour contenir le réchauffement des températures en deçà de 2 degrés Celsius – voire moins, de 1,5 degré – semblent s’éloigner et si rien ne bouge, la planète se dirigera selon la Banque Mondiale vers un réchauffement des températures de 3,2 degrés Celsius d’ici à la fin du siècle. Alors que l’Afrique n’est responsable que de 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, 65% de sa population est directement touchée par le changement climatique. Les menaces liées au changement climatique font peser un risque « extrême » aux deux tiers des villes africaines.
Les grandes banques internationales de développement semblent avoir compris l’ampleur de la menace. La Banque africaine de développement (BAD) a ainsi décidé de doubler les sommes en faveur du climat qui passent à 25 milliards de dollars. Cet argent financera l’agriculture durable, les assurances contre les catastrophes naturelles ou encore la construction d’infrastructures. La BAD va aussi lancer des facilités de crédit pour soutenir les pays qui abandonneront le charbon en faveur des énergies renouvelables. La Banque mondiale quant à elle contribuera elle à hauteur de 22,5 milliards de dollars pour la période 2021-2025 dans le financement de la lutte contre le changement climatique. Ceci est encourageant mais largement insuffisant tant que les banques commerciales continuent à financer des énergies carbonées et qu’une stratégie globale ne soit pas mise en œuvre.
Macron a ensuite vanté les mérites de la France à des étudiants avides d’échanges, en oubliant de leur préciser la récente augmentation des frais d’études dans les universités et écoles françaises et en leur parlant en anglais de l’avantage de savoir parler français.
Le Parti de Gauche salue le renouveau de la structure de regroupement de l’opposition djiboutienne USN et demande au gouvernement français de faire pression sur Djibouti afin que l’accord de 2014 autorisant et réglementant les activités de l’opposition soit enfin mis en œuvre.
Le Parti de Gauche dénoncera toute tentative d’expulsion vers Djibouti du militant de la liberté Mohamed Kadamy, Président du FRUD bénéficiant de l’asile politique en France depuis presque 20 années.
Le Parti de Gauche dénonce l’agitation vaine et trompeuse du gadget One Planet Summit qui veut nous faire accroire que les initiatives privées sont un outil pour la transition énergétique là où seule une stratégie publique coordonnée par grande région africaine et pour toute l’Afrique serait efficiente.
Pierre Boutry
Déclaration de la Commission Afrique du Parti de Gauche