Félix Tshisekedi a été proclamé dans la nuit du 10 janvier à 3 heures du matin à Kinshasa (technique déjà utilisée en face au Congo Brazzaville) vainqueur de la présidentielle à un tour du 30 décembre dernier avec un score de 38,5 % des voix. Ce qui pourrait être une bonne nouvelle puisqu’alternance il y a par rapport à un Kabila au pouvoir depuis janvier 2001, adepte des glissements progressifs des dates d’élection (deux ans), ayant renoncé sous pression internationale à un troisième mandat et qui présentait un homme de paille pour lui succéder façon Poutine-Medvedev, est en fait une sinistre farce.
Kabila, mesurant l’ampleur du retard du dauphin désigné Emmanuel Ramazani Shadary, ex-ministre de l’Intérieur, parvenu de fait en troisième position avec 23,8% des voix, avait au préalable passé un pacte avec Félix Tshisekedi, fils d’Étienne, disparu en février 2017. Félix, dont la presse belge nous informe que le titre académique dont il s’est prévalu pour se présenter est un faux « graduat en marketing et communication ».
Car il fallait à tout prix écarter Martin Fayulu, qui avait tenté d’unifier l’opposition lors d’un conclave en Suisse et failli y arriver jusqu’à la trahison de Félix et qui aurait obtenu selon la Commission électorale nationale indépendante (Céni) 34,8% des voix.
Un « arrangement », une « main tendue » à Félix plutôt que de perdre le pouvoir et plus précisément la mainmise sur les finances et l’appareil sécuritaire.
Nous sommes donc à nouveau confrontés à une inversion de résultats électoraux, il est vrai cette fois-ci, ironie de l’histoire, au profit d’un (faux) opposant !
Il convient de saluer le grand travail réalisé par les 40 000 observateurs déployés par la Conférence épiscopale (Cenco) ; la Cenco a proclamé son attachement au respect de « la vérité des urnes » et ce faisant a bien constaté que Martin Fayulu a très probablement gagné.
Martin Fayulu n’a certes pas un profil d’homme de gauche au vu de son programme qui promet de baisser le taux d’imposition de 30 à 20% sur les bénéfices des entreprises, mais il représentait l’espoir de changement de régime formulé par une grande partie de la population congolaise.
Le Parti de Gauche condamne fermement cette inversion de résultats électoraux et dénonce l’attitude complaisante de l’Union Africaine. Le Conseil de Sécurité ne doit pas accepter cette situation et exercer des pressions afin d’exiger la vérité des urnes à savoir la publication des bordereaux de résultats détaillés.
Le Parti de Gauche réaffirme la position déjà exprimée dans une récente déclaration, de la nécessité d’une transition citoyenne qui permettrait de repenser un système démocratique et progressiste pour le pays.
Pierre Boutry