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COTE D’IVOIRE, DAHLIAFLEUR : Une prise de « conscience écologique » face au « libéralisme sauvage ».

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Début juin 2022, un article publié par  Le Canard Enchaîné, révèle en France l’existence d’un projet touristique qui menace de « bétonner »  le Dahliafleur, réserve naturelle partielle située à quelques kilomètres d’Abidjan,  par la construction d’un complexe hôtelier de 1000 chambres, avec la collaboration du groupe Accor, numéro 1 de l’hôtellerie en Europe. Cette enclave de 148  hectares est localisée dans la commune de Bingerville ancienne capitale du pays proche d’Abidjan, plus précisément dans le quartier Abatta. Elle est limitée par la lagune Ebrié dans sa partie Est. Les conditions  naturelles et la proximité de l’aéroport Félix Houphouët-Boigny  via le futur pont Abatta-Koumassi sont  favorables à l’essor de l’industrie hôtelière de luxe.

La réserve naturelle partielle de Dahliafleur, riche en biodiversité, avec 91 % de forêt primaire bien conservée, 8 hectares de forêts secondaire,  15 espèces de mammifères, 69 espèces d’oiseaux inventoriés,  vient ainsi d’être livré au « libéralisme sauvage » par le gouvernement ivoirien, alors même que la Côte d’Ivoire vient juste d’abriter la COP 15 de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification.

Cependant, le projet d’aménagement de cette réserve naturelle au profit d’un complexe hôtelier destiné à satisfaire les besoins d’une minorité bourgeoise, suscite une vague d’indignation au sein de  la population ivoirienne. Cette réaction collective de l’opinion publique révèle l’existence d’une tradition écologique en Côte d’Ivoire instaurée par le régime du président Laurent Gbagbo.

Le Dahliafleur, symbole d’une longue tradition écologique d’Houphouet-boigny à Laurent Gbagbo.

Le terme « Dahliafleur » est à l’origine le nom de la « fleur préférée » de son propriétaire. Il s’agit d’un horticulteur italien  du nom de Italo Barbeta, qui fut le  fleuriste du président Félix Houphouët-Boigny. C’est en 1974 que le premier président ivoirien cède cet espace à M Barbeta, afin qu’il y développe une plantation de fleurs. Ce dernier y construit un laboratoire pour développer toutes sortes de variété de fleurs. A sa mort, Italo Barbeta sera enterré dans sa réserve, selon ses dernières volontés. L’avenir de Dahlia Fleur était toutefois menacé par la à l’urbanisation galopante de la ville d’Abidjan.

Cependant, en 2000, l’arrivée au pouvoir du président Laurent Gbagbo va initier une révolution écologique en Côte d’Ivoire, par le renforcement du mécanisme régulateur de l’État en matière d’écologie. En 2002, une loi relative à la création, à la gestion et au financement des Parcs nationaux et des réserves naturelles est promulguée. Elle stipule à son article 3  que « les parcs et réserves sont créés et gérés aux fins de permettre la conservation des milieux naturels, de la faune et de la flore terrestres et aquatiques, ainsi que le maintien de la diversité biologique et des processus écologiques contre toute les causes de dégradation qui les menacent ».  Le 14 octobre 2004, le Dahliafleur devenu propriété de l’État de Côte d’Ivoire, est érigé en « réserve naturelle partielle » par l’office ivoirien des réserves et forêts. Enfin le 17 octobre 2007, un décret du président Laurent Gbagbo déclare la réserve naturelle, «  domaine d’utilité publique ».

Cette réserve est aujourd’hui, une destination de choix pour les amateurs de nature. Plusieurs associations y organisent des randonnées. Le Dahliafleur reste un espace écotouristique, ou les amoureux de la nature s’isolent régulièrement.  Ils y viennent « pour des randonnées pédestres, des pique-niques et d’autres rencontres pour se ressourcer et profiter des bienfaits de cette étendue verte. En outre dans le monde universitaire, la réserve se trouve être un lieu privilégié, voire un site d’observation pour la recherche. Plusieurs étudiants en biologie y élaborent leurs travaux scientifiques.

Vive indignation face à un scandale écologique

Depuis le 24 mai 2022, l’information selon laquelle  la réserve naturelle de Dahliafleur  serait détruite au profit d’un projet de construction d’un complexe hôtelier de luxe, enflamme les réseaux sociaux.  A partir du  25 mai, une pétition en ligne contre la destruction de cette réserve de « Dahliafleur », atteignait les 10 000 signataires en fin de journée. La nouvelle publiée par plusieurs médias en ligne, les jeunes ivoiriens ont très tôt, dénoncé le projet de bouleversement de l’écosystème de Dahliafleur ; les média français (France 24, Le Canard Enchaîné, RFI etc  (..) et ONG internationales (Greenpeace) sont sollicités. A Abatta même, il y avait déjà eu des incendies en 2015, 2019 et 2021 provoqués par des jeunes en colère  contre la chefferie qu’ils accusent de vendre les terres aux entreprises.

Cette vague d’indignation poussa finalement le ministère du Tourisme produire un communiqué stipulant que le projet de mise en valeur du site, prévoit un « hôtel écologique »  un parc animalier et un circuit d’écotourisme. Ces allégations du ministère du tourisme ont du mal à passer  au sein des riverains et de la population, et sont visiblement illégaux.

Pour rappel, la loi de 2002 relative à la création, à la gestion et au financement des Parcs nationaux et des réserves naturelles, promulguée par le président Laurent Gbagbo instaure une « protection stricte » des parcs et réserves naturelles. Elle leur confère un caractère « immuable ».  En conséquence, le gouvernement Ouattara, habitué aux initiatives unilatérales et aux « passages en force » spectaculaires, devrait songer à renoncer à ce projet visiblement « écocide ». Mais peut-être que, pour reprendre le titre du Canard Enchaîné, ce bétonnage un  hôtel  Fairmont, le haut de gamme d’Accor, se ferait il « avec l’Accor de Sarko ? » Si tel était le cas, Sarkozy étant administrateur d’Accor depuis 2017 et président de son comité de stratégie internationale, comme le rappelle le journal, Ouattara ne ferait que renvoyer l’ascenseur à celui qui l’a aidé à accéder au pouvoir en 2011.

Cette affaire (à suivre) est donc intéressante à double titre : celui du renforcement de la conscience écologique  chez le peuple ivoirien qui a vu ses forêts livrées au pillage et à la destruction et qui a subi la pollution liée aux déchets toxiques occidentaux importés illégalement sur le territoire et la politique d’un pouvoir aux ordres du capitalisme le plus destructeur des hommes et de la nature. Le Parti de Gauche, qui se fait le chantre de l’écosocialisme, soutient l’opposition ivoirienne et la société civile dans sa lutte pour que la Côte d’Ivoire se développe dans le respect de son intégrité et de sa souveraineté.

Oris Bonhoulou et Pierre Boutry

 déclaration de la Commission Afrique du Parti de Gauche

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